La loi du 28 pluviôse an VIII (17 février 1800) institua dans chaque département un préfet, « seul chargé de l'administration » du département. Le corps préfectoral, ainsi créé, n'a depuis jamais été remis en cause. De la loi du 10 août 1871, qui mit en place un conseil général élu au suffrage universel, à la loi du 2 mars 1982 relative à la décentralisation, le préfet exerça un double rôle. Il fut à la fois le représentant de l'État dans le département et l'organe exécutif du conseil général.
Le préfet : représentant de l’État au pouvoir renforcé
Pendant la Seconde Guerre mondiale, afin d’asseoir son autorité et mettre en œuvre sa politique dans les départements, le gouvernement de Vichy s’appuya fortement sur les préfets. Auparavant, il dut s’assurer de leur fidélité en épurant le corps préfectoral et instaurant en 1941 le serment de fidélité au Maréchal Pétain. Le 19 février 1942, furent ainsi réunis à l’hôtel de ville de Vichy tous les préfets de France pour prêter solennellement serment.
Dans le Morbihan, six préfets se succédèrent pendant l’Occupation. Le préfet Henri Piton, nommé par le Front populaire, resta en fonctions jusqu’en juillet 1941, date de sa mutation pour le département du Vaucluse suite à sa condamnation par les Allemands. Robert Cousin assura l’intérim jusqu’à la nomination de Paul Grimaud, le 14 novembre 1941. Ce dernier fut remplacé par Pierre Marage le 28 octobre 1942. Celui-ci fut mit en position hors cadre par décret du 24 janvier 1944 et remplacé par Roger Constant, qui céda sa place à Jacques Onfroy au moment de la libération de Vannes en 1944.
Après la mutation d’Henri Piton, les préfets, qui se contentèrent d’exécuter des tâches administratives, demeurèrent les agents privilégiés du pouvoir central. Le gouvernement de Vichy entendit bien confirmer leur rôle d’administrateur du département, et même renforcer leurs pouvoirs face aux collectivités territoriales. Dans ce contexte, la loi du 23 décembre 1940 eut pour objectif de rappeler aux préfets leurs fonctions d’exécution des lois et des décisions du gouvernement, et de souligner à tous les chefs de service de l’administration leur subordination à ce dernier.
Par ailleurs, la tutelle administrative exercée par le préfet sur les collectivités territoriales fut renforcée par la loi du 14 novembre 1940. Désormais le préfet put déclarer démissionnaire d'office pour des raisons « d'ordre public ou d'intérêt général » tout conseiller général, d'arrondissement ou municipal. Il pouvait également nommer les maires et adjoints des communes de 2 000 à 10 000 habitants, ainsi que les conseillers municipaux des communes de 2 000 à 50 000 habitants à partir de listes établies par les maires. De plus, il put dissoudre les conseils municipaux des communes de moins de 200 habitants. Au niveau départemental, la loi du 12 octobre 1940 suspendit les sessions des conseils généraux et en confia les pouvoirs aux préfets. Une commission administrative, composée de 7 à 9 membres nommés par le ministre de l’Intérieur pouvait les assister. Elle était purement consultative, et se réunissait uniquement pour examiner les dossiers proposés par le préfet. La loi du 7 août 1942 la remplaça par un conseil départemental composé de membres nommés par le gouvernement.
Dès 1942, le gouvernement de la France libre prépara la libération de la France en prévoyant notamment la mise en place d’institutions provisoires et le remplacement des fonctionnaires vichystes. Furent ainsi créés des commissaires régionaux de la République nommés par le général de Gaulle. Ils étaient dotés de pouvoirs étendus afin de restaurer l’État républicain. Le remplacement des préfets fut également programmé. Dès le 4 août, Roger Constant se retira pour laisser son poste au préfet de la Libération Jacques Onfroy, affirmant ainsi la souveraineté française avant même l’entrée des troupes américaines à Vannes. Le préfet Onfroy fut assisté par les comités départementaux de la Libération. Ces comités, nés dans la clandestinité, jouèrent un rôle important dès la Libération en participant au renouvellement des municipalités, en remplaçant le conseil général dissous et en contribuant grâce à de nombreuses enquêtes à l’épuration pour fait de collaboration.
Administration préfectorale
Le champ d’action du préfet était vaste (contrôle de l’administration locale, organisation des libertés, maintien de l’ordre public, sécurité civile). Il s’appuyait sur différents services préfectoraux pour mettre en œuvre les décisions gouvernementales et pour répondre aux exigences des troupes allemandes. Le cabinet de la préfecture occupait une place particulière dans l’organisation préfectorale, puisqu’il en constituait le pouvoir d’action. Ses attributions découlaient directement de celles du préfet, mais aussi de la préfecture dans son ensemble. Il intervenait donc dans tous les secteurs. Dans certains domaines, il assurait un rôle de coordination, de surveillance et de transmission des informations, sans réel rôle opérationnel. Dans d’autres, il assurait la gestion concrète des dossiers, par exemple les demandes d’ouverture de bureaux de tabac ou de débits de boisson. Pendant la seconde guerre mondiale, le cabinet était un des interlocuteurs privilégiés des autorités allemandes.
Les attributions préfectorales étaient donc réparties entre le cabinet et un nombre variable de divisions et de bureaux. À son arrivée, le préfet Henri Piton réorganisa les attributions respectives des services. En 1938, le cabinet constitua une division à part entière, composée de deux bureaux. Le 1er bureau remplissait des fonctions multiples, telles l’ouverture et la répartition de la correspondance, les affaires politiques ou réservées. Le 2e se chargeait essentiellement de l’instruction publique. La 1re division eut pour missions principales l’administration générale du département et la police. La 2e division se chargea de la comptabilité communale et hospitalière ainsi que des services d’assistance. Quant à la 3e division, elle eut pour attributions la comptabilité de l’État et du département, et les travaux publics.
Le 6 novembre 1940, une note du ministère de l'Intérieur du gouvernement de Vichy incita les préfectures à réformer et réorganiser les bureaux pour harmoniser les différentes préfectures (afin de lutter contre « l'empirisme et la confusion préjudiciable à une bonne administration »). En 1941, les services furent de nouveau réorganisés afin de correspondre le plus possible à la structure type proposée par le ministère. Le cabinet ne constitua plus une division composée de deux bureaux mais un service bien distinct. Les attributions de la 1re division restèrent inchangées, en revanche, la 2e division s’occupa dorénavant intégralement des affaires financières (État, département, communes, hôpitaux). La 3e division se vit attribuer la gestion des affaires relatives à la jeunesse, famille et santé. La 4e division eut en charge toutes les affaires économiques et sociales, en particulier la voirie, l’agriculture, la main-d’œuvre. Des services spécifiques à la guerre et à l’occupation tels que le service départemental des réfugiés ou celui des réquisitions allemandes furent mis en place. Ces derniers, qui n’étaient pas rattachés à une division, étaient en relation directe avec le préfet.
À la Libération, l’organisation des services préfectoraux connut peu de changements.